La légende des trois clefs

Face au raz de marée des séries américaines, la production française a bien du mal à sortir son épingle du jeu. Parmi les chaînes généralistes, celle qui marque le plus de point par son audace est assurément M6. Après Caméra Café et Kaamelott qui ont bouleversé l’univers de l’humour, après les Bleus qui ont filé un sérieux coup de jeune au polar, voici que le surnaturel ne fait plus peur. Et loin de se concentrer sur les fans de super-héros, la nouvelle production s’adresse à toute la famille, puisqu’elle met en vedette trois enfants. Et dès le premier film, la mini-série laisse une impression particulièrement positive tant elle collectionne les bons points. Originale, bien rythmé, l’intrigue mêle un suspens assez prenant, une action plutôt crédible et quelques sentiments pas dégoulinants sans pour autant mélanger le tout jusqu’à l’indigestion ou se perdre en états d’âmes épuisantes. Un énorme progrès que l’on doit en partie à un casting qui sent bon le neuf !

Julie Gayet est une belle-mère pétillante, Thierry Neuvic est idéal en flic décalé, et Julie de Bona assure plutôt bien dans l’action. Côté méchants, Thierry Hancisse et son âme damnée Dominique Guillo sont à leur aise dans le machiavélisme. Mais le plus du casting, on le doit d’abord à Danièle Lebrun, parfaite en grand-mère impressionnante, qui avec un Michel Duchaussoy muet, parvient par son aplomb à rendre crédible la trame surnaturelle. Et puis il y a les trois enfants dont le naturel n’est entaché d’aucun des excès de jeux dont on affuble en général le jeune casting. Une performance d’autant plus convaincante que les deux garçons font ici leurs débuts. Retenons donc leur nom: Paul Blaise est le réservé Damien, Manon Gaurin l’énergique Juliette, et Julien Crampon le déluré Jimmy. Un trio auquel cette mini-série doit beaucoup !

Un autre bon point : grâce à l’excellent travail de repérage, la série collectionne des décors naturels impressionnants tout autour de La Rochelle, battant en brèche le défaut récurent des séries françaises qui ont trop tendance à s’enfermer en studio. Habile, la réalisation choisit même d’appuyer les effets en marquant les personnages par des ambiances de couleur. Un marquage d’univers façon BD ou jeux vidéo, qui fonctionne plutôt bien. Si l’on en juge par les deux premiers films (à l’heure où nous mettons en ligne, personne n’a vu le troisième…), cette Légende des trois clefs est un vrai suspens pour la famille, qui ne souffre que d’un seul réel bémol : une scène d’amour un peu trop torride au cours du second volet. Bien que d’un caractère « stratégique » indéniable, les ébats auraient pu être tempérés… Le concept de La légende des trois clefs présente de toute évidence trois gros avantages. Il prouve que sans pouvoir concurrencer les budgets américains, l’originalité paie dans la forme comme le fond. Il démontre aussi que le spectacle familial s’accommode à merveille d’un casting original et de l’énergie de ces nouveaux venus. Et surtout, en soignant les images et en limitant les effets superflus, il parvient à transformer l’écueil du surnaturel en atout. C’est déjà beaucoup, non ?