Chasseurs de dragons

Gwizdo et Lian-Chu sont complices depuis l’orphelinat. Malingre et peureux, le premier est un maître dans l’art d’extorquer de l’argent. Montagne de muscle au cœur d’or, le second ne rêve que de tranquillité et… de tricot. Accompagnés d’un étrange chien bleu qui parle et peut allumer un feu d’un pipi, ils sont chasseurs de dragons. Car dans cet univers d’îles qui flottent dans les airs, les dragons pullulent, sous toutes les formes et toutes les tailles. Entre l’appétit des dragons et les mauvais payeurs, la vie n’est pas facile… et cela empire lorsqu’ils sauvent la vie d’une fillette. La tête pleine de héros de livres pour midinettes, la petite Zoé est sûre d’avoir trouvé en Gwizdo et Lian-Chu ces chevaliers que son oncle, le richissime seigneur Arnold, cherche désespérément. Le puissant seigneur n’est plus qu’un vieillard malade des suites d’une malédiction qui revient menacer le monde. En effet, les signes annonciateurs du Bouffemonde, le plus terrible et destructeur des dragons, ne cessent de s’accumuler. Nos deux compères sont donc engagés pour sauver le monde… Gwizdo songe surtout à se sauver tout court, en emportant la belle avance sur la récompense ! C’est sans compter sur la malicieuse Zoé…

Ni satire à la Shrek, ni énième resucée du duo chevalier héroïque / vilain dragon, ce Chasseur de Dragons s’approprie les bases de l’héroïc-fantasy pour bâtir un univers original, décapant et exotique. Un ton novateur et des personnages très attachants qui se sont déjà fait une place dans le cœur de nombreux fans de par le monde grâce à la série animée éponyme, elle-même déclinée en DVD, BD, jouets… Préquelle des aventures du terrible duo, ce film n’est pas une simple déclinaison mais bien une aventure à part. Un univers si original que Vincent Lindon, pourtant réticent à ce genre d’exercice, s’est laissé convaincre à doubler Lian Chu, entraînant son complice Patrick Timsit dans l’aventure pour incarner Gwizdo. Philippe Nahon en seigneur aveugle et Amanda Lear en lugubre médecin complètent cette équipe surprenante ! Drôle, enlevée, impertinente parfois, la vigueur du récit tout public est servie par une mise en image carrément bluffante. Une réussite esthétique qui a presque entièrement été fabriquée… en plein cœur de Paris ! Le projet a été piloté par Futurikon (producteur des séries minuscules, Kaput et Zorsky…), qui en a confié l’animation numérique essentiellement à Mac Guff Line, référence en la matière. Le résultat est éloquent. En concurrence directe avec les productions des studios américains, Chasseurs de Dragons est une démonstration de plus du remarquable potentiel de l’animation française.

Si les personnages ronds et expressifs gardent leur approche enfantine, designers et animateurs se sont lâchés sur les décors, remarquables, et le soin apporté à l’animation, fluide, inventive et rapide. Du haut de gamme soutenu par la musique de Klaus Badelt, compositeur notamment du premier Pirates des Caraïbes… Cartoonesques mais pas creux, les personnages font un étonnant contraste avec des dragons surprenants, des décors magnifiques, et une mise en scène navigant entre la poésie, le gaguesque pur et une narration dramatique qui peut, dans certaines scènes, devenir très impressionnante ! Du rire au frisson, ce Chasseurs de Dragons est à découvrir sur grand écran. Histoire de faire mentir les vieux contes où les héros sont nobles à en être sans saveur, et les dragons bêtement dentus. Amateurs de la série animée ou pas, jeunes et moins jeunes y trouveront forcément leur compte, et les aînés qui les accompagneront n’auront pas le temps de s’ennuyer…